Filmée le 20 janvier 1979, cette représentation de l’opéra de Luisa Miller de Verdi serait une bonne leçon pour certaines mises en scènes d’aujourd’hui. Inspirée par Friedrich Schiller sur un livret de Salvatore Cammarano, l’histoire semble un peu grossière, du moins cousue de clichés et de sentimentalismes. On retrouve ici les éternels amants innocents et les méchants comploteurs. Bref, on peut trouver à y redire. Cependant, cette représentation est époustouflante car sur tous les plans, on tente de rendre l’opéra captivant. Dès l’ouverture, James Levine est en grande forme. L’Orchestre du Metropolitan est mené avec vivacité et énergie. Les décors ressemblent à des décors et ne cherchent pas à faire « moderne » ou à faire du symbole à tous les étages. Surtout, évidemment, les interprètes vous laissent sur les fesses. Ah, certes il ne s’agit pas de n’importe quels interprètes, rien moins que Placido Domingo en Rodolfo et Renata Scotto dans le rôle titre. Que s’est-il donc passé ce soir-là pour que les chanteurs et les chanteuses se soient autant surpassés ? Comment une telle magie peut-elle avoir lieu ? Force, voix, conviction, gestuelle, tout y est et on est saisi par les fulgurances. Les autres ne sont pas en reste comme Bonaldo Giaiotti dans le Comte Walter, Jean Kraft en Federica, James Morris en Wurm, Sherrill Milnes en père de Luisa… A la fin, la salle est en délire et les applaudissements sont mérités (ce n’est pas toujours le cas). Bref, cet enregistrement fera date sur le plan interprétatif.

Yannick Rolandeau