Opus Haute Définition e-magazine

The Young Romantic

A portrait de Yundi Li

Yundi Li (piano)

EuroArts 3079058, Harmonia Mundi Distribution

DVD stéréo Dolby / DTS 5.1

Ce documentaire de Barbara Willis est à la fois surprenant et irritant. Irritant parce qu’il commence par le côté autobiographique de ce jeune pianiste chinois, ce qui est la pire façon de brosser le talent d’un pianiste. Aucune culture, aucun parent, aucun pays ne peuvent servir de référence au pourquoi de l’éclosion d’un tel talent. Cela dit, tout y passe ici : parents, grands parents, tantes, maîtresse d’école, première professeur de piano... Surprenant aussi car ce dernier était tellement sévère qu’il martyrisait ses élèves en leur tapant sur les doigts avec une baguette de bambou. Et Yundi Li de commenter qu’un tel système serait interdit en Europe mais que, lui, il a beaucoup appris grâce à cela ! Propos peu communs qui devraient faire réfléchir à notre éducation qui tente même d’interdire la fessée ! Ce documentaire ne nous dit cependant rien d’extraordinaire sur Yundi Li, objet d’adulation de la part de ses parents, et objet de fascination de tous les autres, fétichisé jusqu’à plus soif par les médias, au point où l’on construit des poupées à son effigie. C’est là où le documentaire, peut-être à son insu, est le plus intéressant en révélant le délire médiatique pour un si jeune pianiste. A un moment, Yundi Li assiste à un concert d’une pop star dans un stade et monte sur scène en jouant sur son piano par une trappe (avec en face de lui la pop star à un autre piano). Il joue un morceau classique dans un brouhaha inimaginable tellement le public ne doit pas entendre une seule note de ce qu’il joue ! Mais il est devenu une star en Chine ! Sauf que personne n’écoute vraiment ce qu’il joue. L’image est assez « surréaliste » quand on y songe mais montre bien le « bruit » médiatique qui prétend vénérer un artiste tout en se moquant de ce qu’il interprète, surtout en musique classique… Mais cela ne semble pas déranger notre « star » ! Tout au long de ce documentaire, il n’a pas grand-chose à dire de particulier au point où l’on se demande s’il est « habité » par quelque chose pour jouer aussi bien. Car en même temps, on ne peut pas trop tricher avec la musique classique quand on sait ce que cela coûte en colossal travail ! Peu importe dira-t-on car il joue si bien. C’est vrai. Bien sûr le côté « jeune romantique » est usurpé et kitsch et construit une image mythique ou frelatée. L’important est sans doute ce mystère de l’interprétation, ce qui fait qu’un être humain est réellement humain, dans ce petit supplément d’âme qui le différencie de la machine comme Pat Matheny semble l’avoir oublié récemment en faisant « interpréter » tout un album par des ordinateurs (sauf lui !). Chose que le documentaire n’aborde pas vraiment : ce qui fait le talent de Yundi Li ou en quoi il se distingue des autres. Dommage, mais en cours de rattrapage si j’ose dire, de bonus, Yund Li joue des scherzi de Chopin et une étude de Franz Liszt.

Yannick Rolandeau

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