Disons-le d’emblée, ce premier volume d’une nouvelle intégrale des Sonates pour Piano de Beethoven sous les doigts d’Igor Tchetuev est en tous points remarquables. Igor Tchetuev, souvenez-vous, c’est le prodigieux enregistrement, ayant obtenu un Opus d’Or, des Sonates pour Piano d’Alfred Schnittke paru chez Caro Mitis également. Mais le jeune pianiste russe c’est aussi un style, un son et un toucher uniques. Le programme propose les Sonates N°7, 23 et 26. Cette dernière, en mi bémol majeur « Les Adieux », prend une signification particulière lorsque Tchetuev l’aborde avec une tendresse infinie, rendant à l’œuvre son inspiration originelle. Toutefois, nous le savons, Beethoven n’était pas satisfait du titre imposé par son éditeur auquel il répliqua : « Lebewohl est tout autre chose que « Les Adieux » ; on ne dit le premier qu’à une seule personne, et de cœur seulement, l’autre à toute une assemblée, à des villes entières ». La Sonate N°23 en fa mineur « Appassionata » Op. 57 fut publiée au début de l’année 1807 et considérée par le musicien lui-même « comme sa plus grande ». Igor Tchetuev, là encore déploie un style original offrant à l’architecture de l’œuvre une clarté d’ensemble des plus subtiles. Quant à la Sonate N°7 en ré majeur Op. 10 N°3 dédiée à la comtesse de Browne, en quatre mouvements, elle comporte un largo dont Beethoven parlera des années plus tard en ces termes : « Chacun sentira bien dans ce Largo l’état d’âme en proie à la mélancolie avec les différentes nuances de lumière et d’ombre ». La aussi, les doigts d’Igor Tchetuev font merveilles. Pour conclure, saluons une prise de son en pur DSD restituant parfaitement le timbre et les harmoniques du piano Fazioli utilisé. A la fois chaleureuse, précise et exemplaire celle-ci est un atout considérable pour ce qui s’annonce comme une des références modernes incontournables des Sonates pour Piano de Beethoven.
Jean-Jacques Millo |