Opus Haute Définition e-magazine

W.A. Mozart

Don Giovanni

Johannes Weisser, Marcos Fink, Werner Güra, Sunhae Im. Freiburger Barockorchester. René Jacobs (dir)

Harmonia Mundi HMD 990901314, Harmonia Mundi Distribution

2 DVD stéréo / DTS

Ce chef d’œuvre de Mozart, d’après le livret de Da Ponte, relève du défi sur le plan interprétatif. Il s’agit ici, ni plus ni moins, que de réussir l’alliage parfait entre la légèreté et la profondeur, évitant d’un côté un classicisme trop rigide et de l’autre un romantisme hors de propos. Comédie et drame doivent se marier à la perfection. On se souvient de la une mise en scène de Giorgio Strehler en 1987 dans le prestigieux théâtre de la Scala à Milan, où celle-ci jouait astucieusement de l’ombre et de la lumière et où l’éclairage se plaisait à dessiner de délicats contre-jours. Tout indique l’univers crépusculaire préfigurant la tragédie du désir et la chute finale du héros. Dans un beau boîtier, le DVD de René Jacobs offre une version particulière. Tout d’abord les décors étonnent car on a l’impression de se retrouver dans un lieu presque expressionniste, style le Cabinet du docteur Caligari de Robert Wiene avec ses portes aux étranges allures. Ce n’est pas déplaisant même si on regrette qu’un metteur en scène n’aille pas dans l’optique d’un Fellini avec son Casanova, ce qui serait une relecture fort pertinente de l’homme-mécanique dans sa collection de femmes. Bref, si l’on a quelques réserves sur les costumes ou sur quelques effets de mise en scène, on a heureusement un orchestre en grande forme et une direction de René Jacobs qui redonne de la vigueur, avec des voix superbes. La Donna Anna de Malin Byström est réussie, la voix de Pendatchanska en Donna Elvira est magnifique et la belle Sunhae Im en Zerlina est fort agréable. L’Ottavio de Werner Güra, le Leporello vivant, drôle de Marcos Fink et enfin le Don Giovanni de Johannes Weisser s’en sortent remarquablement. Tout n’est pas du même niveau, bien sûr, comme l’air célèbre Là ci darem la mano joué à grande vitesse. Bref, un Don Giovanni à retenir face aux versions sèche commes par exemple celle de Harnoncourt. En supplément, un intéressant documentaire « Looking for Don Giovanni ».

Yannick Rolandeau

This masterpiece by Mozart, based on the book by Da Ponte, is a challenge to interpret. It requires no more and no less than to succeed in perfectly mixing lightness and depth, avoiding on the one hand a classicism that is too rigid but on the other a romanticism that is irrelevant. Comedy and drama must perfectly unite. Giorgio Strehler’s 1987 stage direction at Milan’s prestigious la Scala delicately used lighting and backlighting to shrewdly shadow play with light. The whole conveys a crepuscular universe that prefigures the tragedy of desire and the hero’s final fall. In a beautiful box set, René Jacob’s DVD offers his version. Firstly, the sets surprise us in that we have the impression of being in an almost expressionist place, as if in Robert Wiene’s Le Cabinet du docteur Caligari with its strangely looking doors. It is not unpleasant, even though it can be regretted that a director would not have the perspective of a Fellini and his Casanova, which would be a highly pertinent re-reading of the mechanical man and his collection of women. In short, while one might have a few reservations vis-à-vis the costumes or some directorial touches, there fortunately is an orchestra in top form under the direction of a vibrant René Jacobs, and superb singing. Malin Byström’s Donna Anna is accomplished, the voice of Pendatchanska as Donna Elvira is magnificent, and the beautiful Sunhae Im as Zerlina is quite agreeable. Werner Güra as Ottavio, the funny Marcos Fink as a lively Lepporello, and finally Johannes Weisser as Don Giovanni all pull off remarkable performances. Everything is not on the same level, of course, namely the famous air Là ci darem la mano that is played too fast. In all, this is a Don Giovanni to keep in mind opposite such dry versions as Harnoncourt’s. As a bonus, there is an interesting documentary called “Looking for Don Giovanni.”

Translation Lawrence Schulman

Visuel