Cet essai musical sur Gustav Mahler est assez rare pour être noté. Face caméra, assis la plupart du temps à un piano, d’une manière directe comme s’il était votre bon vieil ami, à la bonne franquette même, Léonard Bernstein nous parle de la musique du célèbre compositeur viennois Gustav Mahler et de choses plus ou moins cachées qu’elle recèle. De quoi s’agit-il exactement ? En fait, de judaïsme dans certains thèmes et évidemment, Léonard Bernstein a beaucoup de charisme pour nous en parler. Ou encore de l'importance des poèmes populaires du recueil Des Knaben Wunderhorn qui recouvrent l'ensemble des compositions mahlériennes jusqu'à la Quatrième Symphonie. Et pour cela, Léonard Bernstein nous les fait entendre. Il les joue au piano ou bien on les entend joués par les plus prestigieux des orchestres. C’est la partie la plus passionnante de cet essai que de voir la musique décomposée là sous nos yeux. Ce qui est plus contestable en revanche, c’est quand Léonard Bernstein en rajoute un peu, voulant tirer Mahler vers une espèce de naturalisme fort convenu. Comme par exemple la culpabilité immense du compositeur qui, devant un judaïsme trop autoritaire, aurait refoulé ce dernier et aurait opté pour un christianisme de façade vis-à-vis de la résurrection chrétienne. Ou encore : pourquoi la figure du Jeune Tambour terrifié par la mort pour un crime qui n'est pas nommé ? Je vous laisse le découvrir. Si cela est toujours possible, il est difficile d’en faire un thème majeur dans la musique de Mahler. Bernstein tire même des conclusions hautement fantaisistes en indiquant encore que le début de la Neuvième symphonie ferait allusion, rythmiquement parlant, au cœur malade ou défaillant du compositeur. Comme certains ont expliqué le rythme des phrases de Proust par son asthme ! En 95 minutes, en tout cas, Léonard Bernstein tente de nous convaincre du bien fondé de ses thèses. Si certains aspects sont contestables, il n’en reste pas moins que bon nombre de développements musicaux sont passionnants.
Yannick Rolandeau |