Opus Haute Définition e-magazine

Ph. Boesmans

Julie

Malena Ernman, Garry Magee, Kerstin Avempo. Orchestre de chambre de la Monnaie. Kazushi Ono (dir)

Bel Air classiques BAC026, Harmonia Mundi Distribution

DVD stéréo Dolby / DTS 5.1

En 1888, August Strindberg achève sa pièce, sans doute la plus connue, Mademoiselle Julie. En 2005, le Théâtre Royal de La Monnaie de Bruxelles et le Festival d'Aix-en-Provence commande un opéra, Julie, à Philippe Boesmans. Le livret est signé Luc Bondy et Marie-Louise Bischofberger d’après l'œuvre du dramaturge suédois. Pas de doute en tout cas, les racines du théâtre sont très présentes : au tout début, il n’y a aucune musique. Il y a trois personnages, les deux domestiques (et amants) Kirstin et Jean et la jeune fille de la maison, Julie. August Strindberg n’est pas connu pour être tendre et pour ceux qui ne connaissent pas son théâtre, on le rapprochera des films du suédois Ingmar Bergman, histoire de se faire une idée. Nous sommes en tout cas dans les réglements de compte où surgit la vérité des êtres, souvent terrible et tragique. L’histoire se déroule à la fin du XIXe siècle dans un château perdu dans la campagne suédoise et plus particulièrement dans la cuisine de ce château. Kristin, la cuisinière a terminé son service, et commente les agissements de sa maîtresse, Mademoiselle Julie, fille du comte. Jean, le valet du comte vient prendre son repas à la cuisine, révélant des aspirations aristocratiques. Jean et Kristin se considèrent comme fiancés. Julie fait alors irruption dans la cuisine pour inviter Jean à venir danser avec elle. Son attitude provocante est à la fois déplacée et inadaptée à son rang. Le domestique obtempère et l’emmène danser. Peu à peu, Jean va être entraîné par Julie et va devenir son amant. Compositeur en résidence au Théâtre royal de la Monnaie, Philipp Boesmans y a composé l’exclusivité de ses premières d’opéra : La Passion de Gilles (1983), Reigen (1993) et Wintermärchen (1999) sans oublier l’orchestration de L’incoronazione di Poppea de Monteverdi (1989). Avec une grande sobriété et des effets maîtrisés, le compositeur s’inspire de Mahler, de Richard Strauss, Moussorgski (Boris Godounov) et Benjamin Britten. Si la direction d’orchestre de Kerstin Avemo est superbe et que les trois personnages sont remarquablement incarnés par Malena Ernman, Garry Magee, Kerstin Avempo, les décors sont, hélas, affreusement laids et d’une froideur désespérante. Clinique pour tout dire, avec un esprit avant-gardiste déplacé pour l’occasion. La mise en scène de Luc Bondy est alors difficile à juger surtout quand elle joue aussi d’effets un peu superflus. C’est fort dommage pour une œuvre qui méritait mieux. Néanmoins, cet opéra est à découvrir pour sa musique et son sujet.

Yannick Rolandeau

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