Cet opéra de Jules Massenet (1842-1912) est, comme on sait, tiré du roman épistolaire de Goethe, Les souffrances du jeune Werther, paru en 1774 et qui, en son temps, fit des ravages parmi la jeunesse allemande. On connaît sans doute l’intrigue ou le canevas de ce jeune homme, Werther, éperdument amoureux de Charlotte qui ira jusqu’à se suicider par amour pour elle. Cette nouvelle production de Werther, enregistrée le 25 et 28 février 2005, se situe dans les années cinquante, avec donc un net décalage moderniste fort déplacé (mais fort à la mode de nos jours). Déplacé parce que pareille tragédie romantique sonne faux dans cette époque plutôt rock. Musicalement surtout. Certes, le décor unique (un arbre gigantesque) est assez beau et le ténor argentin Marcelo Alvarez dans le rôle de Werther ainsi que la mezzo-soprano lettonne Elina Garanča (quelle coiffure !) dans celui de Charlotte s’en sortent honorablement mais semblent étrangement appareillés. On a bien du mal à voir en Marcelo Alvarez un jeune héros romantique et allemand… Surtout, on a bien du mal à croire dans leur conviction. Tout cela manque franchement d’âme. Si le premier et le second acte soutiennent notre attention, le troisième est fortement ennuyeux et le quatrième ridicule avec un Werther sanglant et une Charlotte au visage barbouillé du sang de son amant… C’est d’un chic ! La direction de Philippe Jordan avec l’orchestre du Wiener Staatsoper est assez fluide et dynamique mais ne parvient à soutenir cette étrange production. Yannick Rolandeau |