Nouveau volet de l'intégrale des symphonies de Dimitri Chostakovitch entreprise par le label Pentatone. Cette fois c'est Yakov Kreizberg que nous retrouvons à la baguette pour, disons-le d'emblée, une interprétation des symphonies N°5 & 9 de tout premier plan. La cinquième symphonie du compositeur russe fit couler beaucoup d'encre puisqu'elle intervint après le fameux article de la Pravda plongeant alors sa vie dans une sécurité des plus précaires. Datant de 1937, la composition de l'œuvre ne prit que trois mois et lorsque Prokofiev l'entendit, ce fut dans un enthousiasme qu'il s'empressa d'immortaliser dans une lettre qu'il adressa à son compatriote : "J'ai enfin entendu votre Cinquième, dans des conditions effroyables il est vrai : c'était à Sokolniki ; on entendait une locomotive siffler au loin tandis que quelqu'un jouait de l'harmonica dans le parc et que des légions de mouches vous piquaient cruellement... De nombreux passages de la symphonie m'ont beaucoup plu, bien qu'il me soit apparu clairement que l'œuvre n'est pas appréciée pour la raison pour laquelle elle devrait l'être ; il me semble que l'on n'a absolument pas remarqué en quoi cette symphonie mérite des éloges. Quoi qu'il en soit, je suis heureux qu'elle soit appréciée car, après toutes ces "machines d'hier" dont nous ont abreuvés dernièrement nos collègues compositeurs, il est bon que quelque chose de neuf voit le jour. On finira bien par comprendre aussi ce qui est essentiel dans cette symphonie". Aujourd'hui, la cinquième symphonie est certainement la plus célèbre de son auteur. Quant à la symphonie N°9, composée en un mois à peine, elle fut un véritable pied de nez à la tradition qui voulait que ce chiffre soit d'une grandeur indéfectible en regard de Beethoven, Schubert ou Bruckner. Chostakovitch en fit une œuvre sarcastique à la mode de Haydn. Dirigeant l'orchestre national russe, Yakov Kreizberg offre ici une vision puissante et expressive de la cinquième. D’une manière générale, sa direction vivante et inspirée rend un bel hommage à ces partitions incontournables. Un enregistrement indispensable.

Jean-Jacques Millo

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