Roméo et Juliette, œuvre théâtrale du grand dramaturge britannique William Shakespeare, a connu de très nombreuses adaptations dans toutes sortes de genres, opéras, littérature, films etc. Il y aurait beaucoup à dire sur le sujet car bien souvent, on voit cette pièce comme un grand drame romantique, deux êtres faits l’un pour l’autre que tout sépare, avec notamment l’implacable rivalité de leur famille respective. Je suis en total désaccord avec une telle vision et considère que Roméo et Juliette ne s’aiment pas autant qu’ils le prétendent (je renvoie à une lecture de René Girard concernant le désir mimétique de l’œuvre). En tout cas, cet opéra de Gounod pour ma part fait fausse route car il opte pour une vision romantique de la pièce de Shakespeare. Pour lors, cette représentation filmée en 1992 joue sur un côté cinématographique, c’est-à-dire installe l’action en pleine nature, comme si on y était. Là aussi, retirer l’artifice théâtral de l’opéra est assez déplaisant car il renforce un côté hyper-naturaliste. Cependant, il faut avouer que le film est convenablement cadré et mis en scène, que les décors sont effectivement très beaux (on aura remarqué la grande part de la production tchèque ici), que la lumière est belle et que, bien sûr, les interprètes sont remarquables. En tout cas, ce n’est pas aussi ridicule que cela pouvait le paraître. Roberto Alagna en tête dans le rôle de Roméo qu’il joue avec une grande conviction, confirmant qu’il est l’un des plus grands ténors actuels (malgré sa récente petite vanité). Angela Gheorghiu est une ravissante et convaincante Juliette. Pavel Novak en Mercutio, Jan Svab en Capulet et Daniel Lipnik en Frère Laurent sont tout à fait crédibles. Ajoutons que Anton Guadagno dirigeant le Czech Philharmonic Chamber Orchestra ne commet pas de fautes de goûts et s’en sort même avec talent. Pour ceux qui aiment ce genre de représentation, une réussite.

Yannick Rolandeau

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