Il est difficile de faire abstraction de l’idéologie qui recouvre ici cette symphonie puisque dans le texte du poème de Schiller, Freude (joie) est remplacé par Freiheit (liberté) ! Comme quoi même la musique peut être détournée. Ode à la liberté donc est le concert donné par Leonard Bernstein le jour de Noël 1989 au Schauspielhaus de Berlin-Est quelques semaines après la chute du mur. Pour faire dans le symbolique lourd, l’orchestre est constitué de plusieurs membres de différents orchestres. Nous sommes donc dans le kitsch et il est pertinent de citer Kundera à ce propos : « La fraternité de tous les hommes ne pourra être fondée que sur le kitsch. » Autrement dit, sur un mensonge, comme si d’ailleurs nous étions la liberté incarnée et les autres les vilains méchants. J’ai déjà du mal à cautionner pareille idéologie, alors que l’on se serve de Beethoven pour la faire passer, trop peu pour moi. Bref, ce concert avait été diffusé un peu partout en LaserDisc et en CD par DG, avec, en prime pour la France, un fragment du mur de Berlin. Tout d’abord, niveau interprétation, cette 9ème symphonie est très très lente. Ensuite, le concert n’est pas en 16/9 comme annoncé mais en 4/3. Les musiciens s’emmêlent les pinceaux et multiplient les fausses notes tandis que les chanteurs ratent leur entrée. Comme je le disais dans le numéro précédent d’Opus HD, Léonard Bernstein en fait parfois trop, avec ici, de la politique plus que de la musique. Le résultat est comme d’habitude maladroit, voire pénible. Il en est toujours ainsi des bonnes intentions. De plus, Unitel a filmé cela un peu n’importe comment avec une image assez vilaine. Pour une fois…

Yannick Rolandeau