À force d’entendre les mêmes œuvres, on finit par attendre quelque chose en plus dans l’interprétation. Parfois, cela vient et parfois cela ne vient pas. Claudio Abbado à la baguette et Alfred Brendel (dont la ressemblance avec Schubert me paraît troublante), au piano, cela a un air de déjà vu. Les deux hommes se connaissent bien et ont souvent enregistré cette oeuvre. Et pourtant… il se passe bien quelque chose dans ce DVD. Ce troisième concerto surprend par l’énergie déployée, l’orchestre est tendu et souple à la fois, et Alfred Brendel, bouillant d’énergie, caresse le piano sans l’aide d’une partition. L’interprétation ici est acérée, vive, d’une grande clarté, d’une lisibilité maximale. S’il en va un peu différemment de la symphonie de Bruckner, l’interprétation n’en est pas moins brûlante et contenue, tension que l’orchestre tient de bout en bout. Visage émacié par la maladie, Claudio Abbado force le respect par l’extrême rigueur et la grande concentration de sa direction. Il dirige aussi avec une énergie extraordinaire ce troisième concerto et cette septième symphonie, totalement investi. C’est très beau à voir, tout simplement. L’ovation qui lui ait donné à la fin par le public est amplement méritée. Parmi le public justement, on remarque au passage un certain Bruno Ganz… Un très beau DVD.
Yannick Rolandeau |