TDK inaugure une nouvelle série de DVD consacré au jazz. Enfin. Voici le premier volume consacré au géant Thelonius Monk, comparable si j’ose faire un tel parallèle en peinture à Pablo Picasso avec son jeu fragmenté, « cassé », ses dissonances harmoniques et ses discontinuités rythmiques absolument géniales, fondées sur le swing et dérivées du "stride" (de l'école noire de Harlem) et du blues. Deux concerts enregistrés en 1966 (en Norvège et au Danemark), en pleine période où Monk était chez Columbia (Monk’s dream, Criss-Cross, It’s Monk time) et avant l’arrivée massive de la pop et de l’électricité. Ce n’est pas vraiment un concert live comme on dit puisqu’il n’y a aucun public ici. Peu importe. Filmées en noir et blanc, les images sont de bonne qualité ainsi que le son. Six morceaux (deux fois Lulu’s back in town), Blue Monk, ‘Round midnight, Don’t Blame me et Epistrophy) extraordinaires, qui ne font que confirmer le génie de cet homme qui commença à jouer à cinq ans et à prendre des leçons à onze. C’est un autodidacte. Il accompagnait à l'orgue et au piano sa mère qui chantait dans une église baptiste. Après des études à la Juilliard School, il entre dans le quartet de Keg Purnell en 1939 et devient partenaire de Kenny Clarke au Minton's Club à New York. Il rencontre Bud Powell et joue avec Coleman Hawkins avec qui il enregistre dès 1944. Jusqu'en 1951, il enregistre en combo, en trio, pour Blue Note et joue dans le big-band de Dizzy Gillespie. Il est interdit de club jusqu'en 1957, à la suite d'une arrestation et du retrait de sa carte de travail pour détention de stupéfiants. Il fait une rentrée triomphale au Five Spot club à New York en compagnie de John Coltrane, Johnny Griffin et Roy Haynes. En 1968 sa carte lui est à nouveau retirée à la suite d'une nouvelle arrestation où il se fait violemment matraquer. C'est à cette époque qu'il rencontre Charlie Rouse avec lequel il jouera très longtemps. À partir de 1961, il se produit avec son quartet composé de Charlie Rouse au saxophone, Larry Gales à la basse et Ben Riley à la batterie. C’est en 1968 que Monk quitte Columbia. À partir de 1972, Monk s'enferme dans le silence et ne touche plus à son piano. Il mourra dix ans plus tard en 1982. Pendant que ces camarades jouent leur solo, Thelonius Monk, se lève, écoute en restant près de son piano ou se balade sur la scène en dansant. C’est unique. Aucun doute. Monk est l’un des derniers géants du jazz ; écouter le solo poétique de Monk dans Don’t blame me. Ne ratez pas un tel DVD.
Yannick Rolandeau Disponible sur | |
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