Il paraît que Rued Langgaard (1893-1952) est connu au Danemark. Guère ici et ce n’est pas cet opéra qui risque de changer grand chose. Né et formé à Copenhague, Langgaard compose dès l’âge de 7 ans et débute comme organiste improvisateur à 12 ans. Sa Première symphonie (1908-11), jugée injouable, est créée (1913) par Fiedler au Philharmonique de Berlin. Après 1918, Langgard devient le "mouton noir" de la musique danoise ; sa popularité naissante est étouffée par la guerre en Allemagne. Mystique, il récuse toutes les formes de la modernité musicale et se replie dans le postromantisme. Il s’attaque à l’establishment musical qui l’écarte de toute fonction. En 1940, il finit par obtenir un poste d’organiste en province et poursuit une œuvre considérable et inégale jusqu’à sa mort. Voilà donc un étrange opéra en deux actes. Il n’y a pas vraiment de personnages bien caractérisés, ni de dramaturgie bien plantée. Cet Antéchrist se déroule en plusieurs monologues où les personnages n’ont guère de rapport entre eux. Bien souvent ils ne font que déclamer et les chanteurs, à cet égard, s’en sortent plutôt bien. Au passage, si quelqu’un pouvait me dire qui est Lucifer dans toute cette histoire, cela m’arrangerait bien car à vrai dire, c’est assez confus. La captation vidéo est elle aussi assez étrange car la caméra, prise d’hystérie, se promène parmi les chanteurs, les survolent, en fait des tonnes pour nous captiver, un peu à la manière du cinéaste Lars Von Trier (référence danoise oblige !), ce qui n’est pas une qualité (c’est dire le tic contemporain et très dans l’air du temps pour « faire vrai »). Bref, l’opéra est assez abstrait et n’est guère captivant, d’autant que la musique de Langgaard est assez grandiloquente au carrefour de Verdi, Richard Strauss et Wagner sans jamais posséder son propre style. Pour ceux qui veulent se risquer dans cette production, le DVD possède des sous-titres français mais la notice est en danois, allemand et anglais. Yannick Rolandeau |