Au sein de ce SACD intitulé « Mendelssohn inspiré par Bach », le pianiste suisse Karl-Andreas Kolly nous offre une relecture du romantisme allemand à travers le prisme du baroque, une conversation intime entre deux génies, orchestrée par un interprète au doigté aussi érudit qu’inspiré. Avec un répertoire exigeant : les « Préludes et Fugues » de Mendelssohn, les « Sonates pour orgue » transcrites pour piano, et quelques pièces de caractère comme « Sehnsüchtig », une paraphrase d’une sarabande de Bach, Le pianiste ne cherche pas à imiter l’orgue, mais à révéler la densité contrapuntique et la clarté polyphonique de ces œuvres, en exploitant les ressources expressives d’un Steinway de 1901, au timbre chaud et profond. Chaque fugue devient un labyrinthe sonore, chaque choral une méditation intérieure. Kolly joue avec les dynamiques, les respirations, les silences, pour faire émerger une spiritualité qui transcende les époques. Né en 1965 à Chur, en Suisse, ce dernier est l’un des pianistes les plus prolifiques de sa génération. Formé auprès de Hans Schicker, Karl Engel et Mieczysław Horszowski, il a remporté de nombreux prix, dont le prestigieux Eduard-Tschumi-Preis pour le meilleur diplôme soliste de l’année. Nous l’aurons compris, cet album n’est pas destiné aux seuls mélomanes avertis. Il parle à tous ceux qui cherchent la beauté dans la structure, l’émotion dans la rigueur, et la modernité dans la tradition. Félix Mendelssohn Bartholdy (1809-1847), souvent considéré comme le « réconciliateur des styles », trouve ici un interprète à sa mesure, ne jouant pas Bach à travers Mendelssohn, mais jouant Mendelssohn comme s’il dialoguait avec Bach.
Jean-Jacques Millo |