"J’habitais alors la pleine campagne, en une région où les paysans chantaient encore volontiers. Je commençais à courir fermes et villages pour écouter les chansons des paysans, faisant chanter les vieux et vieilles, les pâtres et les bergères aux pâturages, les laboureurs et moissonneurs au travail". Ainsi s’exprimait Joseph Canteloube (1879-1957) sur son œuvre la plus célèbre, "Chants D’Auvergne", dont nous avons ici une sélection des cinq recueils, soit vingt-cinq chants. Mais ces derniers devaient subir une orchestration que le compositeur français évoquait en ces mots : "Si le paysan chante sans accompagnement, ce n’est pas une raison suffisante pour l’imiter. Quand le paysan au labour, aux moissons, il ya autour de son chant tout un accompagnement qui, précisément, ne "sentent" pas ceux qui veulent rester "scientifiques". Cet accompagnement n’est entendu que des artistes et des poètes, et encore hélas ! pas de tous. C’est la nature, c’est la terre qui le constituent, et le chant paysan ne peut en être séparé. Seul l’art immatériel, la musique, peut par les timbres, par les rythmes, les harmonies, mouvants, impalpables, évoquer l’atmosphère nécessaire". Avec le Tapiola Sinfonietta, que dirige Pascal Rophé, la soprano Carolyn Sampson offre une version habitée, au souffle léger et profond à la fois. Une réussite.

Jean-Jacques Millo