Les Trios pour piano de Ludwig van Beethoven portent, avec nombre d’autres partitions, l’essence du génie beethovénien qui « a donné l’exemple de tous les dépassements et a si bien agrandi les formes traditionnelles qu’elles paraîtront éternelles et capables de contenir toute invention musicale à venir », soulignait si justement Roland de Candé. Dans l’enregistrement qui nous occupe ici, sont présents les opus 1 N°1 en mi bémol majeur, opus 1 N°2 en sol majeur, opus 1 N°3 en ut mineur, opus 70 N°1 « les esprits » en ré majeur, opus 7O N°2 en mi bémol majeur, ainsi que l’opus 97 « à l’Archiduc » en si bémol majeur. Pauline Chenais au piano, Clémence de Forceville au violon et Angèle Legasa au violoncelle forment le Trio Sõra, dont le moins que l’on puisse dire est qu’il ne manque pas d’atouts avec des sonorités pleines et profondes aux couleurs envoûtantes, un sens de l’architecture indéniable et une ferveur commune offrant un bel équilibre. Hélas, dans l’interprétation « extrémiste » qu’il propose le style beethovénien est sacrifié sur l’autel de la post-modernité, à l’image du symbole présent sur la couverture, un buste du maître de Bonn maculée de peinture colorée, pour faire jeune probablement. Tout cela est fort dommage et oblige le mélomane à retourner vers Kempff, Szeryng et Fournier, pour ne citer que cette version. Bref, un enregistrement uniquement pour les curieux.
Jean-Jacques Millo |