Nouveau volet de l'intégrale des symphonies de Dimitri Chostakovitch entreprise par le label Pentatone. La huitième symphonie est une œuvre de guerre composée durant l'été 1943 et créée à Moscou la même année par le regretté Evgeny Mravinski. Nous le savons, Chostakovitch voulait en premier lieu composer un Oratorio sur le courage du peuple moscovite, mais c'est en définitive vers une symphonie que se porta son choix. Le climat sombre, ténébreux, angoissant que dégage le long adagio initial fait place à des rythmes semblant se départir d'une telle noirceur, mais ce n'est qu'illusion, car ce que décrit alors la musique du compositeur russe est un véritable chaos où sourd avec sauvagerie et barbarie l'écho de plus en plus présent de l'avancée inéluctable des chars. En cinq mouvements, la huitième symphonie s'achève sur un allegretto à l'optimisme voilé. Pour ce nouvel enregistrement, c'est le chef finlandais Paavo Berglund qui dirige l'Orchestre National Russe. Inspirée, spectaculaire et précise sa lecture reflète parfaitement le caractère dramatique et puissant de la partition, tout en tirant de l'orchestre des couleurs idéales. D'une lenteur inhabituelle, la vision de Berglund emporte l'adhésion par son sens de la narration et des effets savamment dosés. A aucun moment, la relative retenue des tempi n'affecte un discours musical d'une parfaite lisibilité. Un enregistrement de tout premier plan, bien supérieur à la version Kitajenko ou encore à celle de Caetani.
Jean-Jacques Millo |