Voici un disque de musique contemporaine tout à fait abordable, d'accès facile qui refuse l'hermétisme voire le masochisme de nombre de partitions d'aujourd'hui. Né en 1946, Olav Anton Thommessen est "l'un des fondateurs du centre d'information de musique de la Norvège et l'initiateur du cours de composition au Conservatoire national supérieur de musique de Norvège". Auteur de plus d'une centaine d'oeuvres, Thommessen entreprit la composition de son poème symphonique "Bull's eye" pour violon solo et double orchestre, datant de 2003, lorsqu'il découvrit la partition oubliée du Concerto pour violon en la majeur de Ole Bull. C'est alors que, fidèle à ses habitudes, notamment dans ses œuvres concertantes, Thommessen eut l'intention "d'emprunter des composantes des thèmes, harmonie, rythme, orchestration et virtuosité de Bull, de les examiner minutieusement et de les confronter ensuite avec son propre matériel". Le résultat est tout à fait remarquable. Dans une sorte de "fusion organique" où s'entremêlent un orchestre double et le violon solo, la force du discours musical réside en une immense palette de jeu, à la fois orchestrale et soliste. Entre virtuosité et évocation élégiaque, l'oeuvre s'écoule tel un vaste fleuve charriant un éventail coloré de réminiscences musicales. Saluons la prestation plus que remarquable du violoniste Peter Herresthal qui parvient à allier en un seul souffle, virtuosité et élan mélodique. La suite du programme de ce Super Audio CD fort intéressant nous propose une pièce pour violon et piano datant de 1981 intitulée "Please accept my ears". Sorte de jeu entre deux instruments au cœur d’un espace interactif. Vient ensuite une page pour violon solo "Cantabile" qui est en fait une étude dont la création remonte à 1995. Ici, une douce nostalgie s'empare de l'instrument à cordes dans un chant se déployant notamment sur le sommet des notes les plus aiguës. Pour tous les amoureux de musique et pour ceux qui n'osent s'aventurer sur la voie de la création contemporaine, cet enregistrement est une découverte à ne pas manquer.

Jean-Jacques Millo