La vraie fausse histoire de cette célébrissime composition qui serait une sorte de remède à l’insomnie d’un notable de l’époque, le comte Hermann Carl von Keyserlingk n’est plus aujourd’hui qu’une anecdote amusante. Car les Variations Goldberg de Jean-Sébastien Bach sont bien plus que cela. Voyage intérieur pour les uns, parcours initiatique pour les autres, elles sont, comme le soulignait si justement Glenn Gould dans l’un de ses écrits : « Une musique qui n’observe ni commencement, ni fin, une musique sans véritable point culminant ni véritable résolution, une musique qui, à l’instar des amants de Baudelaire, repose mollement sur l’aile du vent, sans repos ni trêves. Son unité lui vient dès lors d’une perception intuitive, une unité née du métier et d’un examen rigoureux, adoucie par une maîtrise achevée, et qui nous est révélée ici, comme cela arrive si rarement dans le domaine de l’art, dans la vision d’un dessein subconscient exultant sur un sommet de puissance ». La version que nous propose ce Super Audio CD à la prise de son exemplaire, faisant la part belle aux timbres des instruments en présence, est celle pour Trio à cordes. Défendue avec brio, plénitude et sobriété, elle trouve sous les doigts de l’ensemble Gaede, un souffle nouveau ouvrant sur une méditation jusque là inconnue. Les Variations Goldberg de Jean-Sébastien Bach mènent aussi au langage du cœur. Jean-Jacques Millo |