Dans son ouvrage sur Gustav Mahler paru jadis chez l’Age d’Homme, Jean Matter écrivait : Le tragique de la sixième symphonie conserve une certaine ambigüité. A tout prendre, le la mineur n’y règne pas en maître absolu, ni le tempo de marche inexorable, ni la sonorité funèbre. Et si l’alpha et l’oméga de l’œuvre y sont conformes à son titre, il n’y a pas lieu de confondre les problèmes posés par cette création symphonique avec la destinée personnelle de son créateur. Si Mahler a éliminé du Finale de la sixième le troisième coup de marteau, ce n’est qu’une manière d’attester que la défaite de son héros, si telle est la signification de l’œuvre, ne concerne qu’elle seule ». Jonathan Nott illustre bien cette dimension tragique/humain, humain/tragique en délivrant un discours musical sans pathos incongru et superflu, dans lequel l’œuvre retrouve une grâce trop souvent masquée par le poids du destin. Nous ne sommes plus chez Tchaïkovski et le chef d’orchestre allemand contourne « le problème » avec une rare élégance. Ce dernier délivre donc une vision des plus abouties de l’œuvre que l’on appréciera sans modération.
Jean-Jacques Millo |