Jenůfa est un opéra en trois actes sur un livret écrit par le compositeur, s'inspirant de la pièce Její pastorkyna (Sa belle-fille) de Gabriela Preissová et créé au Théâtre de Brno, le 21 janvier 1904. Il s'agit d'une tragique histoire d'infanticide et de repentance. Le réalisme des sentiments humains et l'intensité dramatique sont aussi célèbres dans l'opéra que dans la pièce dont il s'inspire. L'œuvre est jouée dans sa version originale, bien que sa popularité fut autrefois largement due à la réorchestration de Karel Kovařovic, directeur de l'Opéra de Prague. Il fallut attendre 70 ans pour que la partition originale de Janáček soit à nouveau jouée. Kundera a très bien parlé des œuvres de Janacek (et il a grandement aidé à les populariser), c’est-à-dire dans cette façon moderne non pas de nier les sentiments mais de les retraduire avec toute leur beauté et leur brutalité sans en passer par les développements romantiques. Là est la force de Janacek qui n’a pas vraiment donné de successeurs mais qui se situe quelque part entre Bartok et Stravinski sur la carte européenne des compositeurs du XXe siècle. Cette représentation, d’ailleurs plutôt réussie, fait dans les décors épurés et Ivor Bolton est un chef d’orchestre qui accompagne fort bien ses interprètes. L’orchestre est assez beau sans être trop rutilant. Ces mêmes interprètes semblent habités par ce qu’ils chantent et c’est plutôt une rareté de nos jours. On retiendra le rôle-titre joué par Amanda Roocroft qui développe toutes ses vocalises avec une puissance étonnante. Une belle version d’une des pièces maitresses de Janacek.

Yannick Rolandeau

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