Composée, dans sa version pour orchestre en fin d’année 1786 début 1787, la partition des Sept Dernières Paroles du Christ fut le fruit d’une commande espagnole dont Haydn lui-même en expliqua la genèse en ces termes : « Il y a environ quinze ans, un chanoine de Cadix m’a demandé de composer une musique instrumentale sur les sept dernières paroles du Christ en croix. On avait alors l’habitude à la cathédrale de Cadix d’exécuter tous les ans, durant le carême, un oratorio dont l’effet se trouvait singulièrement renforcé par les circonstances que voici. Les murs, fenêtres et piliers de l’église étaient tendus de noir, seule une grande lampe suspendue au centre rompait cette sainte obscurité. A midi on fermait toutes les portes, et alors commençait la musique. Après un prélude approprié, l’évêque montait en chaire, prononçait une des sept paroles et la commentait. Après quoi il descendait de la chaire, et se prosternait devant l’autel. Cet intervalle de temps était rempli par la musique. L’évêque montait en chaire et en descendait une deuxième, une troisième fois, etc., et chaque fois l’orchestre intervenait à la fin du sermon. J’ai dû dans mon œuvre tenir compte de cette situation. La tâche consistant à faire se succéder sans lasser l’auditeur sept adagios devant durer chacun environ dix minutes n’était pas des plus faciles, et je réalisai bientôt qu’il m’était impossible de respecter les limites de durée qui m’avaient été fixées ». Dix-sept ans après un remarquable enregistrement, Jordi Savall revient sur l’œuvre de Haydn avec un bonheur renouvelé. Enregistré dans l’église de la création (Santa Cueva de Cadix) ce Super Audio CD nous offre, dans des tempi sensiblement plus rapides que la version précédente, une vision plus dramatique à l’urgence éclairée. Agrémenté, dans sa partie livret, de textes originaux de Raimon Panikkar (philosophe et théologien) et de José Saramago (prix Nobel de littérature), l’ensemble restitue pleinement la dimension universelle du combat spirituel entre la beauté et le mal que Jordi Savall évoque avec pertinence. Malgré une prise de son moyenne au niveau de gravure un peu faible, ce SACD mérite une attention sans réserve.
Jean-Jacques Millo Disponible sur | |
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